Proxémie
Vendredi, nouvelle conférence organisée par ma collectivité, cette fois le sujet en était l'accueil. Je dois avouer que le sujet ne m'interpellait pas plus que ça...
Et j'ai, enfin, pu retrouver le nom de cette notion, dont on parle beaucoup en ce moment dans les bibliothèques, mais que l'on ne nomme pas :
Définie par l'anthropologue edward Hall comme une distance relationnelle induite par une distance physique.
Ca paraît compliqué comme ça, mais c'est très simple, c'est une théorisation de ce que nous vivons tous les jours : la distance que nous mettons entre nous et l'autre.Sachant que cette distance est différente selon notre culture : elle est plus courte chez les méditerranéens et plus longue dans les pays du Nord.
Exemples de proxémies dans les pays latins :
- sphère intime (de 15 cm à 45 cm : pour embrasser, chuchoter)
- sphère personnelle (de 45 cm à 1,2 m : pour les amis)
- sphère sociale (de 1,2 m à 3,6 m : pour les connaissances)
- sphère publique (plus de 3,6 m).
J'insiste sur la proxémie, car c'est une nouvelle façon d'envisager l'accueil dans les bibliothèques, qui après nous avoir vu, pendant des siècles, vissés derrière nos banques de prêt, met en place une organisation radicalement différente, et qui, à mon sens, nous exposent beaucoup physiquement et psychologiquement, si elle n'est pas mûrement réfléchie et préparée.
Certes, on va (presque) tous déjà dans les rayons, sous prétexte de ranger des documents, à la rencontre de nos usagers, mais on a la possibilité, si les choses ne se passent bien de pouvoir mettre un obstacle entre eux et nous : la fameuse banque de prêt. Ces nouvelles organisations me donnent l'impression d'une impossibilité de repli en cas de violation de la sphère intime ("touche-moi pas !";-)
D'autant plus que certains modèles en plus du bibliothécaire "mobile" proposent une configuration des lieux, avec une relation cote-à-cote entre l'usager et le bibliothécaire, plutôt que la situation face-à-face, même si j'entends bien, que c'est plus facile pour regarder un écran d'être du même côté que l'usager, pour ma part je n'aime pas le contact quand il n'est pas choisi, et une certaine expérience de lecteurs imbibés ou franchement agressifs fait, qu'en général, j'ai besoin d'un obstacle entre eux et moi au cas ou ça tournerait mal, ce que ne propose pas le modèle cote-à-cote.C'est une nouvelle conception de notre métier, qui lui donne un autre sens, nous ne sommes déjà plus uniquement dans l'accueil, mais en voulant instaurer une relation avec l'usager nous sommes déjà dans ce que nous appelons de nos voeux : la médiation et qui pourrait représenter une des chances de survie de notre profession...
Mais que le chemin va être dur pour y arriver... Il s'agit quand même d'un bouleversement de notre relation ancestrale à l'autre (je me demande si je ne vais pas envisager une psychanalyse avant l'ouverture de la médiathèque ;-) Mais je suis prête aussi à changer d'avis si on m'envoie en stage là !
PS : je tiens quand même à préciser qu'il y a des choses sur lesquelles je ne lâcherais pas : Oui, cher X, je refuse de porter des oreilles de Bunny même si elles sont roses, il faudra trouver autre chose pour nous différencier des usagers.
et je ne suivrais pas non plus le modèle américain qui envoie en formation le personnel des bibliothèques chez Mickey pour une formation sur l'accueil des publics ! (je refuse de me déguiser en Minnie et de faire des bisous aux mômes pour les attirer ;-)
Commentaires
Compte tenu de l'usage des bureaux de renseignements (seulement la moitié des usagers des BU d'Angers connait son existence) et des pratiques des étudiants, la décentralisation du renseignement me semble la voie à suivre. Mais effectivement ça demandera un intense travail sur soi.
Dans certaines cultures (Maghreb notamment), un enfant marque le respect envers un adulte... en ne le regardant pas dans les yeux !